Nom anciennement donné aux protéines. On parlait de l’albumine de l’œuf (de alba, blanc… alors que le blanc d’œuf est jaune !). Puis, en 1901, le chimiste et pharmacien Geoffroy a découvert des « albumines végétales ».

Vers 1910, on a compris qu’il y avait tout une classe de composés différents, et le mot « protéines » a été introduit.

A cette même période, on a donc réservé le mot « albumine » pour désigner une catégorie  particulière de protéines, les albumines, qui sont de petites protéines globulaires solubles dans l’eau.

A noter que le blanc d’œuf ne contient pas « d’albumine », mais des albumines, dont la principale est l’ovalbumine… plus un vingtaine d’autres protéines. On exhorte les métiers de bouche à utiliser des termes qui ne datent pas de plus d’un siècle !

Un terme généralement très mal utilisé, parce que, du point de vue des connaissances de la chimie, le monde culinaire en est resté à il y a deux siècles (voir aussi « chlorophylle »). Il est notamment fautif de dire « l’albumine coagule ».

Initialement, le mot « albumine » fut introduit pour décrire des matières qui coagulaient et qui produisaient de l’ammoniac, lors de la putréfaction. Le mot « albumine » désignait donc des solutions de ce que les chimistes nomment « protéines ».

En 1910, le terme « albumine » a été donné (par une décision internationale) à des protéines particulières : petites, globulaires… C’est ainsi que le blanc d’oeuf contient plusieurs sortes d’albumines (ovalbumine, par exemple), tandis que le sang des mammifères contient une albumine nommée albumine sérique.

L’albumine : une notion périmée, par H. This, vo Kientza

L’albumine ? Une notion périmée de plusieurs siècles. Parlons de protéines.
Albumine ? On entend des cuisiniers dire qu’ « elle coagule », dans diverses circonstances, telles que pâtés, terrine, quenelles, viandes cuites à basse température, poisson braisé… (je donne une liste de ce que j’ai très rapidement trouvé sur internet).
Pourtant, il faut dire, redire, enseigner que l’albumine n’existe pas ; qu’elle n’existe pas plus que n’existe « la chlorophylle », comme évoqué dans un précédent billet.

Pour comprendre, il faut reprendre les choses historiquement. Tout a commencé avec les pharmaciens (qui ont développé les sciences chimiques, avec les chimistes) : au dix-huitième siècle, ils avaient observé que les viandes, les poissons ou les oeufs se distinguaient des végétaux, parce qu’ils putréfiaient, avec une odeur ammoniaquée, bien différente de celle des végétaux qui pourrissent. Plus précisément, ils observèrent la formation d’ammoniaque, qui faisait changer de couleur le « sirop de violette », cet ancêtre des « papiers pH » que l’on utilise pour mesurer l’acidité, et qui ne sont en réalité que des bandes de papier imbibées de composés tels ceux qui donnent la couleur aux fruits et aux fleurs.

Bref, nos chimistes se mirent à tester des tas de produits, et ils découvrirent que le blanc d’œuf était le prototype de ces matières animales coagulantes, d’où le nom d’albumen, pour le blanc d’œuf, et d’ « albumine », pour la partie du blanc d’œuf qui était responsable à la fois de la coagulation et du changement de couleur.

Puis, au tout début du dix-neuvième siècle, le pharmacien Antoine François de Fourcroy découvrit de l’ « albumine » dans les végétaux : dans les lentilles et d’autres légumineuses riches en ce que nous nommons aujourd’hui des protéines, il y a des « substances » qui coagulent à la chaleur, qui putréfient en libérant de l’ammoniac, et qui teintent le sirop de violette.
Puis vint l’analyse chimique et la chimie moderne, qui permirent notamment de reconnaître dans la gélatine la même composition chimique que dans l’albumine… alors que la gélatine ne coagule pas à la chaleur. Et, d’autre part, on découvrit des « substances » qui contenaient aussi de l’azote, putréfiaient en teintant le sirop de violette, mais qui ne coagulaient pas.
Bref, progressivement, les sciences de la chimie comprirent que certains composés seulement entraient dans une catégorie qui fut nommée « protéines » au début du vingtième siècle.
Les molécules de toutes les protéines sont principalement faites de chaînes dont les maillons sont des résidus d’acides aminés. La gélatine, par exemple, est une forme dégradée (par la cuisson) de la protéine nommée « collagène », qui se trouve dans les tissus animaux ; comme on le sait bien, elle ne coagule pas. Le lait contient des « caséines », à côté d’autres protéines ; certaines caséines coagulent… quand on acidifie ou qu’on ajoute de la présure. Les viandes sont des tissus musculaires, dont la contraction est assurée par deux sortes de protéines, nommées « actines » et « myosines », qui coagulent, et le sang contient une protéine qui coagule également (d’où le boudin). L’œuf, enfin, contient une vingtaine de sortes de protéines différentes, et l’ovalbumine, dans le blanc, n’est que l’une d’entre elles (qui coagule, comme on le sait). Elle est l’homologue, bien que différente, de la protéine du sang nommée albumine sérique.
Très généralement, la catégorie est albumines est très vaste, puisqu’elle désigne aujourd’hui des protéines solubles dans l’eau, qui coagulent à la chaleur. Cela n’a plus aucun sens de parler de « l’albumine », et il faut, selon les cas, parler soit des protéines, soit des albumines… mais je doute que la seconde dénomination soit très utile, en cuisine. Parlons donc plutôt des protéines, et laissons l’albumine aux historiens ou aux scientifiques.

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